Cette étude n’a pas la prétention d’être exhaustive, car la chaussure de ski est devenue un ‘monde’ avec un foisonnement de variétés, de modèles, de spécialisations, de matières etc… ; aussi, nous arrêterons-nous à la fin du 20ème siècle.
Bases
Dans son livre ‘ski français’ de 1937, Emile Allais écrit : « Avant d’acheter une paire de skis, achetez d’abord une paire de chaussures. C’est l’équipement le plus important… », recommandation toujours valable au 21ème s (voir la conclusion).
En effet, elle est l’interface jambe/ski et son évolution a été le plus souvent associée à celle des fixations à tel point que les couples ‘fixation/chaussure’ spécifiques sont devenus fréquents à la fin du siècle (le 20ème !).
Rôle de la chaussure
Protection du pied + transmission du mouvement impulsé par le skieur.
Qualités recherchées
• Bon maintien de la cheville : elle doit empêcher l’inclinaison latérale mais permettre une flexion antérieure plus ou moins importante selon l’usage prévu.
• Confort : ne pas blesser et bien isoler du froid.
• Imperméabilité : évidence de base mais en évitant l’étanchéité qui favorise la transpiration donc l’humidité.
• Solidité / légèreté : qualités secondaires qui ne dépendent que de l’usage prévu (et du prix !)
• Conclusion : la chaussure universelle n’existe pas et il faudra toujours faires des compromis suivant les usages prévus (ou acheter plusieurs types de chaussures !).
Rappel des pratiques
Deux sont les pratiques de base qui vont guider notre étude.
Le ski nordique :
C’est le ski ancestral où il faut alterner propulsion et glisse pour se déplacer : la propulsion se fait en ‘marchant’ c’est-à-dire, en levant le talon et en donnant une impulsion avec l’avant-pied qui doit rester fixe, donc faire plier la semelle.
On parle actuellement (du moins en France) de ski de fond si c’est sur des pistes et de randonnée nordique si c’est en dehors.
Le ski alpin :
Pratique récente (milieu du siècle) où le déplacement se fait uniquement en glissant par gravité : pas besoin de pouvoir marcher donc d’avoir une semelle qui plie.
Si on utilise un moyen artificiel pour atteindre le départ, on parlera de ski de piste voire même d’hors-piste.
Cas particulier de la ‘randonnée alpine’:
On peut schématiser en disant qu’on monte en ‘nordique’ et qu’on descend en ‘alpin ! Pour le matériel (dont bien sûr, la chaussure), des compromis ont donc dûs être trouvés.
Leur chronologie simplifiée
- De la préhistoire à 1er tiers du 20ème siècle : ski nordique seul (talon libre, semelle souple)
- Pendant le 2ème tiers du 20ème s. : période ‘clé’ qui, voit arriver l’alpin qui, en une trentaine d’années, a chassé le nordique (du moins dans les massifs montagneux).
- Du dernier tiers du 20ème s. à maintenant : le ski alpin domine nettement, mais le ski nordique ‘renaît de ses cendres’.
Conséquences sur les chaussures
Semelle souple ou rigide ? Il s’agit en effet de la principale différence induite par le genre de ski pratiqué :
- pour le ski nordique : semelle obligatoirement souple pour préserver un déroulement naturel du pied et donc permettre la marche. Pour la tige (haute ou basse) la souplesse est gage de confort et de liberté de la cheville.- pour l’alpin ‘de piste’ : semelle totalement rigide pour que la pression ARàAV de la fixation ne la déforme pas. La tige doit être rigide pour bien tenir la cheville latéralement tout en donnant une possibilité de flexion AV<>AR- pour la randonnée ‘alpine’, le problème se complique sérieusement car le talon doit être libre à la montée et bloqué à la descente ; donc il faudrait une chaussure souple pour la montée et rigide pour la descente ce qui est utopique. Mais nous verrons comment ce dilemne a été résolu (tardivement mais correctement).
Les matériaux…
… de la tige
Seulement 2 principaux le cuir et le plastique qui vont nous servir de guide, d’autant plus qu’ils se sont succédés dans le temps.
Quelques autres matières : l’osier tressé (antiquité), la fourrure (tige et semelle, ex.ci-contre), métal pour la coque (ex.magnésium Dalé USA-1969), toile souvent enduite de plastique ou caoutchouc…
… de la semelle
• Le cuir
Plusieurs épaisseurs suivant la rigidité recherchée. Mais fragilité, déformations etc…
Quelques fois protections métalliques : cloutage, fers etc…
• Le caoutchouc (semelle d’usure)
Apparu tardivement, d’abord en couche mince partielle, puis encore + tard (fin des années 30) en couche épaisse très découpée : la célèbre semelle italienne ‘VIBRAM’ (Vitale Bramani) qui n’a été bien diffusée chez-nous qu’après la guerre et principalement pour les chaussures de randonnée alpine.
Le ‘balata’ (isomère du caoutchouc) a été aussi utilisé au 19ème s. en Scandinavie.
• Le plastique
Il a remplacé progressivement les précédentes pour toutes les activités sur piste tant alpines que nordiques. (voir les § ci-après)
• Le bois
A été souvent utilisé pendant la 2ème guerre. C’était un très bon isolant du froid mais totalement rigide sauf à y mettre une charnière (comme dans l’exemple ci-dessous).
On a vu aussi des montages ‘amateur’ avec des sabots et des tiges cuir.
Problème de la liaison tige/semelle
C’est le point capital de la fabrication des chaussures en général mais plus particulièrement pour les chaussures de ski vu les fortes contraintes d’arrachement qu’elles subissent.
• Par couture (cuir/cuir)
Pour les chaussures de montagne (donc celles de ski) les coutures doubles sont indispensables.
Deux modes principaux :
- La couture GOODYEAR faite à la machine depuis la fin du 19ème s. : les 2 coutures sont faites en une passe et une seule reste visible.
- La couture ‘norvégienne’ utilisée à l’origine pour les chaussures ‘LAUPAR (marque norvégienne de matériel de ski du début du siècle) : il d’agit d’une double couture faite en 2 passes sur trépointe, ce qui donne un aspect caractéristique. C’est le mode à privilégier car le plus solide et le plus étanche mais le plus cher.=>
• Par soudure (plastique/cuir ou plastique/plastique)
Une semelle extérieure en PU injecté est soudée au moulage ce qui accélère considérablement la fabrication et donc en réduit le coût : ce procédé a été initié en 1962 par LANGE et rapidement utilisé par NORDICA et par LE TRAPPEURpour sa sous-marque bon-marché ‘CHAMOIS’ qui coutait 30% de moins que la même chaussure cousue.Mais ensuite, la généralisation des coques plastique (entièrement moulées) a supprimé ce problème de la liaison et l’éventuelle semelle d’usure est seulement collée.
LES CHAUSSURES 'CUIR'
Leur propre histoire couvre toute celle du ski et nous allons la décomposer par périodes.
Le cuir a de faibles propriétés mécaniques et se déforme facilement quand est humide. De même son imperméabilité dépend des traitements qu’on lui fait (graissage, cirage, enduction etc…).
Avant le 20ème s.
Il n’y avait pas de chaussures spéciales pour les rares skieurs : ils utilisaient ce qu’ils avaient ‘sous la main’ pour le travail ou la montagne.
Fabrication ‘sur mesure’ par des cordonniers, malheureusement souvent non skieurs.
Il y a très souvent une doublure en cuir ou en fourrure ou en toile.
Exception : les lapons utilisaient des chaussures spéciales à bout en forme de crochet qui se glissent sous la bride d’orteils et empêchent qu’elles ressortent par l’AR.
Début du 20ème s. (avant les années 30)
On commence à voir des chaussures cataloguées ‘ski’ et des productions en série.
Exemple en 1913 : =>
Rubrique du catalogue Manufrance : les chaussures ne sont pas dans la rubrique ‘Ski’ mais dans ‘Alpinisme’ : un seul modèle dit 'ski', mais on voit deux surchaussures qui améliorent l’isolation.Dans le catalogue 1926, on retrouve cette même chaussure ‘Laupar’ seule, mais sous le titre “Brodequins spéciaux pour le ski“ (prix 165F).
Exemple en 1927 (pub) :
La qualification ’ski’ est ici bien revendiquée et la couture norvégienne est bien visible.
On trouve ici 2 nouveautés :
- Le bout de la chaussure est de forme carrée : c’est un perfectionnement qui facilite l’encastrement dans les étriers métalliques, améliorant ainsi la tenue latérale.
- Le talon est creusé d’une gorge qui retient bien la bride talonnière, caractéristique qui se retrouvera ensuite sur toutes les chaussures de ski en cuir.
Années 30
Cette période est celle où va commencer la différenciation entre le ski nordique et le ski alpin: c’était dû à l’apparition de fixations qui facilitent la descente en bridant le talon (fixations dites ‘diagonales’ destinées au ski ‘alpin’).
Pour le ‘nordique’ :
Les anciennes fixations à talon toujours libre (dites ‘parallèles’) restent proposées ; mais en Norvège, une nouvelle fixation est apparue : la ROTTEFELLA* (piège à rats) qui marque le début de ce qui allait devenir plus tard, la ‘norme 75’ (toujours utilisée au 21ème s.)
Apparemment à l’époque, elle n’aurait été diffusée qu’en Allemagne sous le nom traduit de “Rattenfell’.
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*) Le brevet (Bror With) date de 1927, mais la commercialisation n’a été effective en France que plus tard.
Pour l’alpin :
Le câble a permis d’avoir la forte tension ARàAV nécessaire au maintien du talon et ça avait tendance à courber la semelle si celle-ci était trop souple ! Cependant, comme la ‘marche’ devait rester possible, une semelle totalement rigide n’aurait pas été pas adaptée: il fallait donc un compromis qui autorisait quand même un petit levé de talon.• Nous allons étudier 3 modèles (catalogues Jamet de 1934 et 36) qui permettent de bien appréhender l’évolution des chaussures de cette époque.
1) Modèle Kandahar =>
C’est le modèle compétition. La semelle est rigidifiée par une lame métallique et il y a une bride de serrage du cou-de-pied.
La couture est Goodyear (1 fil visible).
2) Modèle Trappeur :
C‘est un modèle standard.
La souplesse de l’ensemble est conservée, et le ‘cousu norvégien’ est bien décrit. À noter la bride supplémentaire pour resserrer le haut de la tige et limiter les rentrées de neige et la couture norvégienne.
3) Modèle Ansen :
Prévu pour le ‘ski de fond’ ; il ressemble au précédent mais avec construction (donc semelle aussi) revendiquée ‘plus souple’. On remarquera :
- l’absence de couture visible
- un bout carré standard,
• Cette période voit aussi fleurir des protections de semelles surtout latérales à l’avant pour éviter la déformation du cuir dans les étriers. Pour éliminer les rentrées d’eau par les trous des lacets, on voit aussi souvent des rabats qui camouflent le laçage.
Sur l’illustration ci-contre, on remarquera la déformation en galoche de la semelle et l’avachissement de la tige, défauts constants lors du vieillissement des chaussures souples.
Années 40 à 50
Pour les chaussures, cette période ‘après-guerre’ n’a présenté que peu d’évolutions marquantes et le matériel de ski nordique est absent des catalogues (du moins français).
Les chaussures sont soit des modèles d’avant-guerre ± “relookées“, soit des modèles ‘piste’ à semelle rigide. La ‘double-tige’ et le double laçage sont réservés aux modèles ‘haut de gamme’. On trouve aussi de temps en temps un laçage AR.
Dans les années 50, la suppression des étriers, remplacés par les butées de sécurité, a entraîné l’arrondissement du bout de la chaussure.
La chaussure à crochets :
C’est la grande nouveauté de l’époque : elle permet un serrage rapide et néanmoins très efficace ; c’était une invention helvétique qui ne s’est généralisée que tardivement:
- 1948 : un coordonnier de Broc (Joseph MAURON) propose des fermetures à boucle métallique. Mais il s’agissait de ‘sur-mesure’ donc d’une diffusion confidentielle non brevetée (et non imagée) !
- 1954 : un autre suisse, cycliste, Henri MARTIN de Fribourg, dépose le brevet (US 286.1310).
- 1955 : l’entreprise HENKE (encore la suisse) est la 1ère à commercialiser une chaussure à boucles (la “SPEED FIT“).
Cette pub Henke de 1956 montre que crochets et lacets cohabitent dans la gamme; on notera aussi que le ‘cousu-norvégien’ n’est présent que sur la plus chère.
Années 60 (cuir)
Cette décennie sera celle de l’arrivée du plastique (voir §) et le ski nordique est le grand oublié (du moins en France !).
Ce n’est qu’en 1961 que le français TRAPPEUR et le suisse MOLITOR lancent leurs chaussures à crochet après avoir acheté le brevet à HENKE. D’autres y ajoutent des câbles comme, par exemple, le français HESCHUNG avec cette chaussure (‘Molitor Compétition’) adoptée par l’équipe de France (pub de 1967).En 1961 aussi, TRAPPEUR est le 1er à renforcer la tige avec de la fibre de verre : c’est son modèle ELITE qui ‘fera un tabac’ commercial.
En fin de période, on voit apparaître le cuir plastifié : il s’agissait de minces feuilles de plastique laminé collées à chaud sur l’extérieur du cuir permettant de l’imperméabiliser, de le renforcer et de le colorier.
En analysant le catalogue du Vieux Campeur de 1967 nous remarquons que :
- il n’y a AUCUN matériel nordique.- il n’y a que des chaussures en cuir (30 modèles ‘ski’)- 9 à lacets, 17 à crochets- 4 modèles spéciaux (3 montagne/ski et 1 ski de rando (Galibier): ils sont tous à lacets, mais 3 modèles ont, en plus, des brides à crochet : exemple =>
En résumé : cette période est celle du début du règne du jeune ’roi’ alpin et l’effacement du vieux ski nordique.
Années 70 (cuir)
Cette décennie va profiter des ‘retombées’ mondiales des JO de 1968 (Grenoble) ; le ‘ski de fond’ est (re)découvert par le public et la gloire des skieurs alpins français rejaillit sur les fabricants de matériels et sur le commerce.
Comme témoin, nous allons utiliser la ‘bible’ du matériel en France à cette époque : le catalogue du Vieux Campeur de 1975.
Le ski nordique (semelles souples)
Tout le matériel (fixations et chaussures) correspond à ce qui sera ‘officialisé’ un peu plus tard comme ‘Norme 75’.
Les chaussures ‘de fond’ occupent 2 pages avec 13 modèles tous à lacets.
Les bas de gamme sont en caoutchouc, ou en toile enduite de PVC.
Quatre modèles sont en vrai cuir dont 2 plastifiés et le très ‘haut de gamme’ est en cuir de Kangourou ! Cinq modèles sont à tige mi-haute.
Sur la page ‘ski de randonnée’*, on voit un modèle ‘à l’ancienne’ (Galibier Corrençon) avec semelle ‘montagne’ semi-rigide cousue ‘norvégien’, une tige en cuir waterproof lacée.
*) Elle ne distingue pas la randonnée nordique de l’alpine.
Le ski alpin (semelle rigide)
Le plastique est omniprésent : le cuir a quasiment disparu sauf pour 1 modèle enfant plastifié et 6 modèles de ski de randonnée alpine (5 à lacets/crochets ou 1 à lacets seuls) ; exemple =>
À signaler que cette décennie verra, enfin, la normalisation des fixations et semelles pour le ski alpin.
Années 80 (cuir)
Le ski nordique (semelles souples)
- Pour le ski de fond sur piste :
C’est l’inflation des normes : chaque fabricant a la sienne et ça rend le pratiquant captif de la marque ! Les différences portent sur les semelles, toutes en plastique, qui doivent être bien souples longitudinalement mais rigides transversalement.
Exemple de normes ‘fix/chaussure’ : SNS (Salomon), RNC (Rossignol), Adidas, NNN et N50 (Rottefella), TXC (Tyrolia) etc….
Tout ça donne l’impression que les pratiquants, même ceux qui veulent simplement se promener, doivent acheter et se déguiser en coureurs !
Pour les chaussures, le cuir a pratiquement disparu remplacé par du simili ou des toiles diverses enduites ou plastifiées : en 1988, nous avons trouvé seulement 2 Salomon (SR401et SR 451) en cuir enduit de PU.
Les modèles ‘touristiques’ sont minoritaires et reconnus à leur tige plus haute.
- Pour du fond ‘hors trace’ (= randonnée nordique)
On trouve encore ici du ‘traditionnel’ avec la ‘norme 75’ dont toutes les chaussures sont, au moins partiellement, encore en cuir le plus souvent enduits PU.On voit aussi quelques rares chaussures dites ‘télémark’ qui sont les mêmes mais en cuir + épais et + rigide. =>
Pour le ski alpin (semelles rigides)
Plus de cuir apparent° : le plastique a tout balayé, même pour la randonnée (voir § suivant).
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°) mais encore quelques fois, pour des chaussons intérieurs.
Années ultérieures
Le ‘ski de fond’ va progressivement perdre beaucoup de pratiquants dits ‘touristiques’ ; les ‘sportifs’ eux, ne jurent que par la ‘skating’ : ceux qui voulaient simplement se promener se sont rendus compte que la ‘raquette’ était plus adaptée et une autre (petite) partie se sont mis à la randonnée nordique (fond hors-piste) pour retrouver leur liberté !
Le cuir va rapidement disparaître de toutes les chaussures à semelle souple, sauf pour quelques très rares modèles traditionnels de randonnée nordique.
LES CHAUSSURES 'PLASTIQUE'
L’arrivée du plastique pour la chaussure a été une énorme rupture technique dans le matériel de ski, rupture certainement plus importante que celle induite par le métal pour les skis.
Il a permis de s’approcher de la ‘quadrature du cercle’ en arrivant à associer technicité et confort, tout en permettant une production industrielle gage de prix modérés.
Mais la chaussure tout plastique est, sauf exception, destinée uniquement au ski alpin.
L’initiateur : LANGE
C’est le travail de Robert LANGE aux USA : les progrès de le ‘plasturgie’ permettent d’injecter sous-vide, du PU liquide dans un moule.Brevet US 339.952 1965/66 (=CA 714.750) =>
- 1er modèle en 1962 : chaussure à lacets. Coque basse moulée avec la semelle et surmontée ensuite d’une tige en cuir.
- 2ème modèle en 1965 : la coque complète est moulée en une fois, la semelle est creusée et les crochets sont apparus. Présence d’un chausson intérieur =>
- Remarque : le brevet (1965) corespond en réalité à la chaussure de 1962 qui n’était donc pas encore couverte par le brevet ; on a peut-être là l’explication du fait que Nordica et Trappeur aient utilisé, dès 1962, un procédé plus ou moins identique.
L’évolution des chaussons
À l’intérieur des coques, le chausson permet l’isolation et le maintien tout en étant confortable ; il est le plus souvent amovible (séchage) et on peut le voir comme une sorte de chaussure interne.
C’est LANGE qui a monté la voie avec son chausson ‘Lange Flo’.
• Chaussons injectés :
Développé par NORDICA au tout début des années 70. Le chausson est à double paroi avec une valve. On le rentre dans la coque avec le pied dedans et on injecte de la mousse de PU qui va s’expanser et mouler tout le pied. Nécessite un appareil spécial et un pofessionnel pour la mise en œuvre.
Donc processus long, délicat et cher qui a été quasi abandonné sauf par SIDAS pour les chaussures de compétition et même, pour d’autres, afin de les personnaliser et/ou les adapter à des pieds très ‘biscornus’.
• Chaussons auto-moulants ou thermo-formables
Le chausson double paroi est vendu avec une mousse interne dite ‘EVA’ ; la chaleur du pied va la déformer et on obtient donc un moulage. Au refroidissement, la mousse se fige et conserve la forme du pied.
Ils ont été très utilisés à partir des années 80 avec des progrès dans les mousses, et ce sont devenus ‘le standard’.
Il y a même des fabricants spécialisés dans les chaussons seuls : ex. en France avec SIDAS à Voiron. =>
• Chaussons en feutre :
Essentiellement utilisé dans les bas de gamme sauf pour de nombreux modèles de randonnée où il double une couche externe de cuir mince (vrai ou faux).
Par rapport au PU, l’avantage est l’absortion de la transpiration et la diminution du poids !
L’evolution des coques
Les évolutions extérieures sont les seules visibles, alors que de gros progrès ont été fait dans ce qui ne se voit pas !
• L’ouverture
La plus utilisée a été et est toujours, l’ouverture ‘portefeuille’ avec un rabat ou un capot. Mais la rigidité du plastique (sutout au froid) rendait le chaussage souvent pénible.
- Chaussage par l’AR :
Début années 70, invention de GARMONT (Italie) grâce à un capot articulé (Brevet 31865 – 1969/71). Cette formule va être utilisée ensuite par de nombreux chausseurs pour leurs gammes ‘confort’.
En 1980, SALOMON commence à ‘innonder’ le marché avec sa gamme SX ; il est ainsi devenu, en quelques années, un des premiers fabricant mondial de chaussures de ski.
Mais ce genre de chaussure va progressivement disparaître dans les décennies suivantes.
- Coque ouvrante :
Quelques essais aux USA, mais le plus connu est celui de RAICHLE (Suisse) en 1970 =>
• Les formes
C’est essentiellement la hauteur de tige qui joue : plus elle est haute, plus la chaussure est dite ’technique’.
Au début des années 80, on voit même fleurir (sans lendemains) de véritables bottes.
• La matière
En 1964 : ROSEMOUNT (USA) a fabriqué une coque en fibre de verre avec capot en alu (la PLAYBOY) arrêtée en 1970.
On a vu aussi un dérivé du nylon (Rilsan), du PVC etc. Mais le plus performant reste le PU (polyuréthane) avec plus ou moins d’additifs ou renforts (fibres de verre ou de carbone)
Les fabricants sont arrivés à avoir des coques d’épaisseurs différentes suivant les zones, permettant ainsi d’avoir de la souplesse par endroit et de la rigidité ailleurs ; ça a rendu aisé le chaussage (même celui des chaussures ‘techniques’ même au froid) et c’est probablement la cause de la quasi-disparition du chaussage AR.
• Les fermetures
Les crochets sont généralisés mais leur nombre varie suivant la technicité souhaitée : ça va de 2 pour des chaussures de débutant à 5 pour celles de compétition.
Ils peuvent être associés à du câble, ce qui permet de réduire le nombre de crochets.
• Les accessoires
- Réglage du “canting“ :
Permet de modifier l’angle latéral de la tige pour permettre de skier pieds à plat même avec un ‘genu varum’ ou ‘…valgum’. Réglage devenu courant pour les ‘haut de gamme’.
-Réglage du débattement du collier : (exemple ci-dessous)
-Les inserts (cf § spécial - lien en fin d'article)
L’arrivée du plastique dans le domaine de la randonnée a permis d’inclure des pièces métalliques dans la semelle afin d’utiliser des nouvelles fixations dites ‘à inserts’.
Il y a deux systèmes :- -1990 : le système LOW TECH avec inserts AV et AR qui existe toujours au 21ème s.
- - 1993 : le système SILVRETTA avec inserts uniquement AV ; abandonné 4 ans plus tard.
<= Une seule marque de chaussures (DACHSTEIN) a inclu les deux 2 systèmes sur un même modèle.
Les cas particulier des chaussures ‘télémark’
Pourquoi ce chapitre ? Parce j’avais écrit en introduction : « la chaussure tout plastique est, sauf exception, destinée uniquement au ski alpin » et il me faut donc parler de cette exception !
• D’abord un petit rappel : Telemark° est une province norvégienne qui a donné son nom à l’élégante (mais difficile) façon de faire un virage à ski au 19ème s. et il autorise d’avoir une liberté permanente du talon.
Dans nos massifs alpins, ce technique a disparu dans les années 40/60, mais depuis la fin du siècle, il est revenu à la mode : en effet il est vraiment universel car il peut se faire dans n’importe quelle pente (mais d’autant moins facilement qu’elle augmente) ; c’est devenu la technique idéale pour la randonnée nordique, mais on en voit de plus en plus sur (et hors) les pistes des stations alpines.
• Les chaussures doivent donc avoir une semelle souple, mais une rigidité latérale importante. Nous avons vu que, pour ce type de rando, le cuir/lacets a fait un peu de résistance, mais depuis les années 90 le plastique le supplante presque totalement.
Elles ressemblent beaucoup à celles de rando alpine, mais avec un ‘soufflet’ à l’endroit de la pliure, derrière les orteils ; la tige est plus souple et il n’y a plus besoin de système ski/marche à l’AR car la cheville plie peu (c’est le genou qui doit faire l’esentiel du travail).
Elles obéissent, pour la grand majorité, à la norme ‘NN75 – 3 pins’ : les pins étant 3 picots mâles des fixations qui s’inserrent dans les 3 trous que l’on voit sur l’avant de la semelle).
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°) le nom commun, francisé, de ce mode de ski est : télémark (sans majuscule et avec accents).
En guise de conclusion
Nous n’avons donc fait qu’effleurer le problème des chaussures et de ses variétés de plus en plus nombreuses : c’est pourquoi cette étude s’est arrêtée avec le siècle précédent car, par exemple (catalogue Vieux Campeur) nous trouvons en 2016…
… pour l’alpin : 123 modèles en 9 catégories :
14 Sport Loisir, 14 Performance, 24 Expert, 2 Racing, 23 Free Ride, 9 Free Rando (ils ont oublié la catégorie “ Free…ME“ !), 29 Rando Tourisme, 2 Rando Alpinisme et enfin 10 Télémark (dont 1 ‘rétrochic’ en cuir + lacets).
…pour le nordique : 42 modèles en 3 catégories et 6 sous-catégories :
-Classique : 8 Evasion, 6 Fittness et 1 Compétition
-Skating : 10 Fittness, 6 Performance et 7 Compéttion
-Skiathlon : 4 modèles sous la norme ‘PROLINK’ c’est à dire ski+chaussure dédiée (j’ai cru comprendre que s’est fait pour randonner en skating !!!).
On peut ainsi se rendre-compte qu’en 2016, le ski de fond ‘évasion’ est devenu minoritaire et que le télémark est, ici, considéré ici comme ‘alpin’.
Il y a donc de quoi décourager toute analyse sérieuse et aussi penser que les acheteurs sont un peu déboussolés (ça permet ainsi peut-être aux vendeurs de conseiller le plus cher !).
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Pour enfoncer le clou, une anecdote perso : j’ai eu l’occasion de participer à un petit slalom lors d’une manifestation rétro : j’avais sorti de mon musée, une paire de Dynamic K (bois, carres et Kandahar) de 2m10 et, pour bien jouer le jeu, j’ai utilisé des chaussures cuir double tige à lacets des années 50.
Je n’ai réussi qu’à faire de laborieux virages ‘chasse-neige’ avec un ‘mal aux pieds’ en prime!
Vexé, j’ai alors fait comme les autres participants et utilisé mes chaussures habituelles (plastiques de rando Scarpa) et là, ma vie a été transformée car j’ai pu descendre agréablement en christiania (quelques fois quand même un peu ‘stemmé’ !).
Moralité : on peut skier avec n’importe quelles ‘planches’ mais pas avec n’importe quelles chaussures. (Emile Allais n’avait pas lu mon article !)
C.Richardin
Vers § 'FIXATIONS À INSERTS' =>